Du savon et des larmes. Le soap opera, une subculture féminine
Delphine Chedaleux, Editions Amsterdam, 2022.
Dallas, Dynastie, Les Feux de l’amour… ces titres évoquent un univers désuet, stéréotypé et associé au féminin : celui du soap opera. Né à la radio au début des années 1930, puis transposé à la télévision, il est d’abord financé par des
fabricants de produits d’hygiène et d’entretien – d’où son nom saugrenu. Les feuilletons qui en relèvent, diffusés l’après-midi à l’intention des femmes, sont alors construits autour d’un personnage de mère courage qui prodigue des conseils moraux et pratiques à son entourage, à grand renfort de produits dont les mérites sont ainsi vantés aux consommatrices. Cet ouvrage se veut une invitation à découvrir ce format et son histoire, à l’intersection du capitalisme, des médias et du genre. Si le soap s’est largement transformé au gré des mutations médiatiques, sociales et politiques, il reste une « technologie de genre » qui circonscrit le féminin à la vie domestique et sentimentale. Mais il crée aussi, paradoxalement, des espaces individuels et collectifs de contestation des hiérarchies sexuées, tant par sa narration ouverte, qui permet l’expression de multiples points de vue et ne délivre aucune morale, qu’à travers les sociabilités qu’il suscite.
Delphine Chedaleux est historienne des médias et maîtresse de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université de Technologie de Compiègne. Ses recherches portent sur les cultures médiatiques féminines, au croisement du genre et de la classe.