“Comment apprend-on la sexualité ? Auprès de qui, à quel âge, à travers quelles pratiques apprend-on à séduire, désirer, fantasmer ou faire l’amour, et à le faire d’une manière spécifique, différente de celle des individus ayant vécu une autre histoire ? Comment en vient-on à considérer certaines attirances et certains actes sexuels comme évidents, tandis que d’autres sont au contraire difficilement envisageables, voire proscrits ? (…) Prendre pour objet les processus à l’œuvre dans la socialisation sexuelle permet de comprendre comment les individus intériorisent, à travers un certain nombre d’expériences sociales, les schèmes d’action, de pensée et de perception qui orientent leurs conduites en matière de sexualité, et de montrer en particulier comment ils acquièrent ceux de ces schèmes qui sont le plus volontiers naturalisés : les attirances, les désirs, les goûts ou les dégoûts. En adoptant une définition large de la sexualité, qui inclut à la fois les pratiques, les normes et les catégorisations, ainsi que les savoirs qui leur sont associés, le présent dossier espère donner à voir la pertinence de cet angle d’analyse pour nourrir la réflexion sur la construction sociale de la sexualité. Plus largement, il souhaite aussi montrer l’intérêt d’un rapprochement théorique et empirique entre deux domaines de recherche rarement mis en dialogue – la sociologie de la sexualité et la sociologie de la socialisation – et inviter à poursuivre ce rapprochement dans de futures enquêtes.”