Iris Marion Young
Journée d’étude organisée le 15 novembre 2024 à l’Université Paris Nanterre (Bâtiment Weber – salle de conférences 2).
Cette journée d’étude cherche à contribuer à la diffusion de la philosophie d’Iris Marion Young, figure centrale de la philosophie politique féministe états-unienne et des pensées contemporaines de la démocratie, dans le paysage philosophique français. Sa pensée, centrée autour des concepts de justice, de différence, d’oppression et de domination, d’inclusion, de solidarité, et de responsabilité, est d’une remarquable richesse. Difficilement classable, la philosophe emprunte ses références à la phénoménologie continentale, aux théories libérales de la justice et aux pensées de la délibération, à la théorie critique francfortoise, en passant par le marxisme, le postmodernisme ou encore la psychanalyse féministe. Contre une approche désincarnée de la question de la justice, elle ancre ses réflexions dans une analyse attentive aux mouvements sociaux-démocrates, anti-validistes, écologistes, noirs, chicanos, portoricains et indigènes parmi d’autres, se réclamant de ce point de vue d’une « théorie non-idéale », cherchant à établir des normes communes pour lutter contre les injustices, en affirmant cependant qu’une telle formulation est toujours circonstanciée, car formulée dans un contexte socio-historique donné. L’éclectisme de ses références n’empêche cependant pas de dégager certaines lignes directrices de son projet philosophique : celui d’une description et d’une dénonciation de l’oppression (l’empêchement du développement des capacités individuelles) et de la domination (l’entrave à l’exercice desdites capacités), d’une lutte contre l’exclusion et de la défense d’un idéal d’inclusion différenciée, dans le cadre d’une ontologie sociale fondée sur les principes de solidarité et de responsabilité. Méthodologiquement, l’œuvre de Young articule deux versants : une phénoménologie féministe d’une part, cherchant à décrire les expériences de l’oppression des femmes, une théorie politique, d’autre part, qui élargit la perspective de l’oppression de genre à d’autres oppressions et qui cherche à les ressaisir, dans leur ensemble, à un niveau macro-structurel, dans le cadre d’une théorie politique.
La journée d’étude cherchera à articuler toutes les dimensions de ce projet philosophique. Il s’agira tout autant de questionner la philosophie de Young dans la diversité de ses ancrages, d’interroger certaines tensions et difficultés de son projet, que de réfléchir aux différentes manières de penser avec elle certaines questions philosophiques plus larges. La première session sera consacrée au projet phénoménologique féministe de Young, resseré autour de la question de l’expérience de la domination des enfants, et questionné à l’aune des épistémologies féministes du point de vue situé et de perspectives sociologiques. La deuxième session cherchera à expliquer et approfondir la critique youngienne de l’exclusion, de l’oppression et de la domination. La troisième session sera consacrée à la manière dont on peut penser, avec Young, la question du commun, c’est-à-dire à la fois la possibilité de l’alliance et/ou de la coalition, et les échelles à partir desquelles l’action commune peut se jouer. Enfin, il s’agira d’interroger l’insertion de Young dans d’autres corpus : Young peut-elle être considérée comme une penseuse du néo-républicanisme? Quels rapports peuvent être tissés entre sa philosophie et le pragmatisme ?